Voici un historique des textes édictés par l’Eglise Catholique à l’encontre de la Franc-Maçonnerie (source : Quid 2000). La plupart d’entre eux est disponible dans ce dossier.
La maçonnerie spéculative anglaise, créée par des membres du clergé protestant, excluait, dès 1723, athées et libertins. Elle considère toujours que la présence de la Bible sur l’autel et l’obligation de prêter serment sur le Livre saint la croyance au “Grand Architecte de l’Univers” (expression non biblique, désignant le Dieu Créateur) et en sa volonté révélée sont les landmarks (“bornes”, marques distinctives) de la maçonnerie. En pays musulman, aux Indes ou en Extrême-Orient, les protestants peuvent prêter serment sur le livre sacré de leur confession.
1738 -4-5 1ière bulle papale condamnant et excommuniant les francs-maçons (In Eminenti de Clément XII) en raison du secret de leurs assemblées et “pour d’autres motifs justes et raisonnables de Nous connus”. Selon Alec Mellor (né en 1907), ces motifs n’étaient pas d’ordre doctrinal (car l’ordre ne fut pas condamné comme hérétique), mais de nature politico-religieuse, le St-Siège protégeant les Stuarts, détrônés et réfugiés à Rome, mais ne voulant pas détacher les Écossais du Nord, partisans des Stuarts quoique protestants, du prétendant Charles-Édouard (qui préparait le débarquement de 1745 et qui aurait restauré le catholicisme en Angleterre). M.-P. Chevallier, au contraire, pense que le pape a craint de voir dans la maçonnerie une résurgence du jansénisme et du quiétisme. La bulle, n’ayant pas été enregistrée par le parlement de Paris, ne fut pas applicable en France, mais rendit la vie maçonnique précaire en Espagne, au Portugal, en Amérique latine et dans les États italiens.
1751 bulle Providas de Benoît XIV, aussi peu explicite (mais il est douteux que les idées du XVIIIe s. et la philosophie des “lumières” soient visées car l’offensive antireligieuse des encyclopédistes n’a pas été déclenchée).
1776 bulle Inscrutabili de Pie VI condamnant les idées du XVIIIième s. : la franc-maçonnerie n’est pas nommée.
1821 encyclique Ecclesiam de Pie VII.
1865 -26-10 Pie IX reproche à Mgr Darboy d’avoir donné l’absoute au Mal Magnan, Grand Maître du Grand Orient, en présence d’insignes maçonniques posés sur le cercueil.
1873 encyclique Et si multa de Pie IX, condamnant moins la maçonnerie que les carbonari et autres sectes politiques secrètes qui noyautaient les loges.
1877 après la Belgique, la Hongrie et divers pays d’Amérique du Sud, le Grand Orient de France décide de supprimer de la Constitution l’article 1er imposant la croyance en Dieu et en l’immortalité de l’âme. La rupture devient alors définitive entre Français et Anglo-Saxons (elle restera moins nette entre la “Masonry” et les obédiences continentales ou sud-américaines, qui ont pourtant eu les mêmes problèmes).
1884 -20-8 encyclique Humanum genus de Léon XIII reprochant à la maçonnerie l’anticléricalisme militant, le positivisme et le rationalisme adoptés officiellement par le Grand Orient. Cette encyclique s’explique aussi par les tendances de la maçonnerie italienne de l’époque, visant à détruire le pouvoir temporel des papes et escomptant la destruction à plus ou moins longue échéance du catholicisme.
En raison des condamnations de l’Église, la maçonnerie prend souvent, en pays catholique, des formes différentes de la “Masonry” britannique : un certain mysticisme ésotérique, plus ou moins orthodoxe, s’y est introduit au XVIIIième s. et s’y maintiendra parfois avec le caractère “catholique” de certains grades (écossais trinitaires par exemple) dans lequel certains ont voulu voir, à tort, la main des jésuites. A l’inverse, dès 1750, il y eut sur le continent une maçonnerie inspirée par l’Aufklärung allemande (philosophie des lumières ou anti-obscurantisme) de Christian Thomasius (1655-1728), qui deviendra libérale et “nationale” au XIXième s.
La maçonnerie sud-américaine jouera un rôle important dans les guerres d’indépendance, bien des maçons italiens seront des apôtres de l’unité italienne, les loges tchèques et hongroises joueront un rôle capital dans la renaissance de leur pays.
1915 -27-5 le canon 2335 de Benoît XV excommunie les francs-maçons : “Sont frappés d’excommunication latae sentenciae (par le fait même) tous ceux qui donnent leur adhésion à une secte maçonnique ou à des sociétés secrètes qui se livrent à des complots contre l’Église ou des pouvoirs civils légitimes.”
1961 -18-3 pour la 1ière fois depuis 2 siècles, un ecclésiastique, le père Michel Riquet, jésuite, entre officiellement pour prononcer une conférence dans un temple maçonnique français (loge Volney du Grand Orient à Laval, Mayenne ; le vénérable Marius Lepage fut suspendu : il démissionnera en 1963).
1974 -11-9 la Sacrée Congrégation de la doctrine de la foi (ex-Saint-Office), sous la signature du cardinal Seper, dit que le canon 2335 ne viserait que les catholiques faisant partie d’associations agissant contre l’Église, ce qui n’est pas explicitement le cas de la “Masonry” anglo-saxonne ni des obédiences “régulières” telles la GLNF, la GLDF ou la GLTSO. Cependant, il reste toujours interdit aux clercs, religieux et membres des instituts séculiers de faire partie d’une association maçonnique quelle qu’elle soit, sauf dispense individuelle délivrée par l’évêque du lieu.
1983 le nouveau Code de droit canon (canon 1184) ne mentionne pas les francs-maçons parmi ceux auxquels on doit refuser des funérailles à l’Église. Il ne maintient pas l’excommunication prévue par l’ancien canon 2335. Le nouveau canon 1374 prévoit simplement que “doivent être punis d’une juste peine ceux qui donnent leur nom à une association qui se livre à des complots contre l’Église : les promoteurs ou dirigeants d’une telle association seront punis par l’interdit”. -26-11 la Congrégation pour la doctrine de la foi rappelle l’interdiction pour les catholiques de s’inscrire dans une loge, ceux qui s’y inscrivent “sont en état de péché grave et ne peuvent accéder à la sainte communion”.
1985 -22-2 l’Osservatore Romano rappelle cette interdiction. Les 5 obédiences françaises signent en commun avec les Églises un appel à la fraternité contre le racisme.
1987 colloque maçon-catholique à Toulouse. -13-7 le synode général de l’Église d’Angleterre, par 394 voix contre 52, qualifie la franc-maçonnerie d’hérétique et juge la pratique maçonnique incompatible avec l’appartenance à l’Église chrétienne.
Vous trouverez ici les principales “bulles” et autres documents issus de l’Eglise Catholique sur la Franc-Maçonnerie.
- Franc-Maçonnerie et Religion : Liaisons dangereuses ou entente cordiale ?
- Les rapports entre la F-M et l’église catholique de Rome, par Joseph Cardinal Ratzinger, Préfet
- Commentaire de 1985 dans l’Osservatore Romano
- Lettre encyclique de LÉON XIII du 20 avril 1884 sur la secte des francs-maçons
- Allocution consistoriale de PIE IX le 25 septembre 1865 Multiplices inter
- Lettre apostolique de LÉON XII du 13 mars 1826 Quo graviora
- Bulle de PIE VII du 13 septembre 1821 Ecclesiam a Jesu Christo
- Bulle de BENOIT XIV du 16 mars 1751 Providas
- Bulle de CLÉMENT XII du 28 avril 1738 In eminenti