Texte des Grandes Constitutions révisées à Lausanne (1875)

Article I

Les constitutions, statuts et règlements adoptés le 1er mai 1786 devront être strictement, observés dans tous les articles qui ne seront point contraires aux présentes déclarations. Les articles contraires aux présentes déclarations sont et demeurent abrogés par les présentes.

 

Article II

1. Le 33ème degré confère aux Maçons qui le possèdent légitimement les qualité, titre, privilège et autorité de Souvø Grands Inspecteurs Généraux de l’Ordre.

2. Les Souvø Grands Inspecteurs Généraux ont pour mission et devoir spécial d’instruire et d’éclairer leurs Frères ; de maintenir parmi eux les principes de l’amour du prochain, de la concorde et de la fraternité ; d’observer eux mêmes et d’assurer de la part des autres Maçons la régularité dans le travail de chaque Grade ; d’apporter tous leurs soins à la rigoureuse observation des doctrines, principes, constitutions, statuts et règlements de l’Ordre ; de les appliquer et de les affirmer en toute occasion, enfin de se manifester partout comme des ouvriers de paix et de miséricorde.

3. Il est formé une réunion de membres du même grade, sous le titre distinctif de Suprême Conseil du 33ème et dernier degré, ou des Souvø Grands Inspecteurs Généraux de l’Ordre ; et ce Suprême Conseil est organisé ainsi qu’il-suit :

a) Dans le lieu propre à posséder un Suprême Conseil du 33éme et dernier degré, un délégué d’un Suprême Conseil Confédéré, Souvø Grand Inspecteur Général, 33éme degré, aura, par les présentes déclarations, et dans les conditions ci après fixées la faculté de conférer ce degré à un autre Frère, s’il l’en juge digne par son caractère, sa science et ses grades, et il recevra le serment du nouvel élu.

b) Tous deux ensuite et de la même manière, pourront conférer le même grade à un autre Maçon, et ainsi de suite pour le nombre des Souvø Grands Inspecteurs Généraux nécessaire à la Constitution d’un Suprême Conseil dont le nombre des membres actifs doit être au moins de neuf.

4. Ainsi pourra se constituer un Suprême Conseil du 33éme et dernier degré.

5. Tout candidat, pour être admis dans un Suprême Conseil constitué, devra obtenir l’unanimité des suffrages, et ces suffrages devront être exprimés à haute voix, en commençant par le plus jeune, c’est à dire par le dernier admis. Une seule voix opposante suffit pour faire refuser le candidat ; mais si les raisons alléguées ne sont pas reconnues valables par la majorité, il pourra être passé outre. Dans le cas où il y aurait plus d’une voix opposante, le candidat serait définitivement repoussé. Les membres d’un Suprême Conseil sont nommés ad vitam. Telle est la loi qui devra être observée en toute occasion semblable.

 

Article III

1. Partout où il est créé un Suprême Conseil, les offices, en dehors de la Grande Maîtrise réservée de droit pour une première période de neuf ans au maximum au Frère le plus ancien, sont donnés, à l’élection et à la majorité des suffrages exprimés, pour une période qui ne pourra excéder neuf ans, à partir du jour de la formation du dit Suprême Conseil ; cette période expirée, il est procédé, pour tous les offices, à une nouvelle élection.

2. Les Suprême Conseil actuellement existants auront à renommer tous leurs officiers, y compris le TøPøSøGøCø Grand Maître et son Lieutenant, pour une durée qui ne pourra excéder neuf années ; cette réélection devra avoir lieu dans un délai maximum de neuf ans, à partir du jour de la promulgation des présentes et de l’Acte de Confédération du 22 septembre 1875.

3. Il sera pourvu par l’élection aux vacances, au fur et à mesure qu’elles se produiront dans le Suprême Conseil ; cette élection aura lieu aussitôt après la vacance, et le nouvel élu ne demeurera en fonctions que le temps qui restait à courir à son prédécesseur.

4. Les membres sortants pourront toujours être réélus dans leurs offices.

5. Un officier du Suprême Conseil démissionnaire de ses fonctions, conservera sa qualité de membre actif du Suprême Conseil.

 

Article IV

Chaque Suprême Conseil fixera les sommes à payer, dans sa juridiction, pour l’obtention des grades, et décidera de l’emploi de ces sommes pour le plus grand bien de l’Ordre.

 

Article V

1. Tout Suprême Conseil devra être composé d’au moins neuf membres actifs, Souvø Grands Inspecteurs Généraux du 33ème et dernier degré, et ne pourra excéder le nombre de 33 membres actifs.

2. Toute délibération du Suprême Conseil, pour être valablement prise, devra avoir lieu en présence du tiers au moins de ses membres actifs, et sous la présidence du TøPøSøGøCø, Grand Maître ou de son Lieutenant, à moins d’une délégation expresse et spéciale du Grand Maître donnée à un membre actif pour présider en son absence.

3. Les Suprêmes Conseils réguliers actuellement reconnus sont maintenus dans leur juridiction territoriale ; mais à l’avenir il ne pourra être créé qu’un seul Suprême Conseil dans l’étendue de chaque État souverain.

 

Article VI

Le Suprême Conseil n’exerce pas toujours une autorité directe dans les grades au dessous du 17ème degré, à savoir des Chevø d’Orient et d’Occident.

Il peut en faire la délégation suivant les circonstances et les localités, et cette délégation peut même être tacite, mais son droit est imprescriptible ; en conséquence, les présentes décident que toute Loge et tout Conseil de Maçons réguliers, de quelque grade que ce soit, reconnaîtront aux membres du 33ème et dernier degré les prérogatives des Souvø Grands Inspecteurs Généraux de l’Ordre, se soumettront à leur autorité, leur rendront les honneurs qui leur seront dus, leur obéiront et leur accorderont la confiance à laquelle ils ont droit, pour toutes les prescriptions qu’ils pourront faire dans l’intérêt de l’ordre, en vue de l’observation de ses lois, des présentes constitutions, des prérogatives desdits inspecteurs généraux, soit particulières, soit temporaires, soit personnelles.

 

Article VII

Tout, Atelier et tout maçon de l’obédience a le droit d’en appeler au Suprême Conseil de toute sentence ou jugement maçonnique.

La présente disposition permet aux appelants de comparaître en personne et d’être entendus dans leurs observations.

 

Article VIII

Tous les Ateliers de l’obédience du 1er au 33ème degré, élisent leur président selon les prescriptions édictées par leur Suprême Conseil.

 

Article IX

Dans la juridiction d’un Suprême Conseil Confédéré, aucun Souvø Grands Inspecteurs Généraux du 33ème et dernier degré, aucun délégué d’une autre obédience écossaise ne pourra user de ses pouvoirs maçonniques, sans être reconnu par ce Suprême Conseil et avoir obtenu son approbation.

 

Article X

A partir de l’adoption des présentes constitutions, nul Souvø Grand Inspecteur Général du 33ème et dernier degré ne pourra, de son autorité privée, conférer à qui que ce soit aucun grade maçon ni délivrer aucun diplôme ou patente.

 

Article XI

Les 30ème , 31ème et 32ème grades ne devront être conférés qu’à des maçons qui en auront été jugés dignes, et en présence de trois Souvø Grands Inspecteurs Généraux, ou d’un seul Souvø Grand Inspecteur Général pourvu de l’approbation écrite et spéciale de deux autres Souvø Grands Inspecteurs Généraux 33ème et dernier degré.

 

Article XII

Dans toutes les cérémonies maçonniques auxquelles le Suprême Conseil assistera en corps, et dans tous cortèges solennels où figureront les hauts grades, le Suprême Conseil viendra en dernier, et les deux premiers officiers marcheront après tous les autres membres du Suprême Conseil ayant devant eux le Grø Porte Etendard et le Grø Porte Glaive.

 

Article XIII

1. Le Suprême Conseil doit tenir régulièrement ses séances le troisième jour de la lune nouvelle, de trois en trois nouvelles lunes. Il sera convoqué plus souvent en cas de nécessité urgente.

2. Indépendamment des fêtes solennelles de l’Ordre, le Suprême Conseil aura trois fêtes annuelles qui lui sont particulières : aux calendes d’octobre, au 27 décembre, et aux calendes de mai.

 

Article XIV

Dans tout pays où il existe un Suprême Conseil du 33ème et dernier degré régulièrement établi et reconnu, la majorité des suffrages est nécessaire pour donner force de loi aux actes des Souvø Grands Inspecteurs Généraux. En conséquence, dans toute l’étendue du territoire placé sous la juridiction d’un Supra. Cons :. régulier, aucun Souvø Grands Inspecteurs Généraux ne sera admis à faire acte d’autorité individuelle ou représentative, à moins d’avoir reçu, à cet effet, un mandat spécial dudit Suprême Conseil ; et pour le cas où le Souvø Grand Inspecteur Général relèverait d’une autre juridiction, il devra se pourvoir au préalable d’une autorisation désignée sous le nom « d’Exequatur » et délivrée par le Suprême Conseil de la juridiction.

 

Article XV

Toutes les sommes perçues, à quelque titre que ce soit, seront versées dans le trésor de l’obédience, par les soins des présidents et trésoriers de chaque atelier, des Souvø Grands Inspecteurs Généraux de l’Illø. Grø Secrø, Grø Chancelier et du Grø Trésorier de l’Ordre. La gestion et l’emploi de ces sommes seront placés sous la direction et la surveillance du Suprême Conseil qui aura soin d’exiger que chaque année, les comptes lui soient fidèlement et régulièrement rendus, et il devra en donner communication à tous les ateliers placés sous la juridiction.

 

Article XVI

Sont et demeurent abrogés les art. XII, XIII et XIV des anciennes constitutions. En foi de quoi, les présentes, délibérées et votées en séance solennelle du Convent, régulièrement constitué à l’Orient de Lausanne, ont été revêtues de la signature des délégués des différentes puissances maçonniques, pour avoir force de loi auprès de toutes les obédiences du RøEøAøAø, le 22ème jour de la lune Eloul, 6ème du mois de l’an de la véritable lumière 5875, vulgo, vingt deux septembre mil huit cent soixante-quinze.

Le Manifeste du Convent de Lausanne (1875)

Depuis trop longtemps, et dans ces derniers temps surtout, la Maçonnerie a été l’objet des plus injurieuses attaques.

Au moment où le Convent, après examen attentif des anciennes constitutions du Rite écossais ancien et accepté, conservant avec un religieux respect les sages dispositions qui le protègent et le perpétuent, délivre la Maçonnerie de vaines entraves et veut la pénétrer de plus en plus du souffle de liberté qui anime notre époque ; au moment où sur des bases inébranlables, il sanctionne une intime alliance entre les Maçons du monde entier, le Convent ne peut se séparer sans répondre par une éclatante manifestation à de déplorables calomnies et à d’énergiques anathèmes.

Avant tout, aux hommes qui, pour se présenter à la Franc-Maçonnerie, veulent connaître ses principes, elle les proclame par la déclaration suivante, qui est son programme officiel et dont les expressions ont été arrêtées par le Convent.

 

Déclaration de Principes

La Franc-maçonnerie proclame, comme elle a proclamé dès son origine, l’existence d’un principe créateur, sous le nom de Grand Architecte de l’Univers.

Elle n’impose aucune limite à la recherche de la vérité, et c’est pour garantir à tous cette liberté qu’elle exige de tous la tolérance.

La Franc-maçonnerie est donc ouverte aux hommes de toute nationalité, de toute race, de toute croyance.

Elle interdit dans les ateliers toute discussion politique et religieuse ; elle accueille tout profane, quelles que soient ses opinions en politique et en religion, dont elle n’a pas à se préoccuper, pourvu qu’il soit libre et de bonnes mœurs.

La Franc-maçonnerie a pour but de lutter contre l’ignorance sous toutes ses formes ; c’est une école mutuelle dont le programme se résume ainsi : obéir aux lois de son pays, vivre selon l’honneur, pratiquer la justice, aimer son semblable, travailler sans relâche au bonheur de l’humanité et poursuivre son émancipation progressive et pacifique.

Voilà ce que la Franc-maçonnerie adopte et veut faire adopter à ceux qui ont le désir d’appartenir à la famille maçonnique.

Mais à côté de cette déclaration de principes, le Convent a besoin de proclamer les doctrines sur lesquelles la Maçonnerie s’appuie ; il veut que chacun les connaisse.

Pour relever l’homme a ses propres yeux, pour le rendre digne de sa mission sur la terre, la Maçonnerie pose le principe que le Créateur suprême a donné à l’homme, comme bien le plus précieux, la liberté ; la liberté, patrimoine de l’humanité toute entière, rayon d’en haut qu’aucun pouvoir n’a le droit d’éteindre ni d’amortir et qui est la source des sentiments d’honneur et de dignité.

Depuis la préparation au premier grade jusqu’à l’obtention du grade le plus élevé de la Maçonnerie écossaise, la première condition sans laquelle rien n’est accordé à l’aspirant, c’est une réputation d’honneur et de probité incontestée.

Aux hommes pour qui la religion est la consolation suprême, la Maçonnerie dit : Cultivez votre religion sans obstacle, suivez les inspirations de votre conscience ; la Franc-maçonnerie n’est pas une religion, elle n’a pas un culte ; aussi elle veut l’instruction laïque, sa doctrine est toute entière dans cette belle prescription : Aime ton prochain.

A ceux qui redoutent avec tant de raison les dissensions politiques, la Maçonnerie dit : Je proscris de mes réunions toute discussion, tout débat politique ; sois pour ta patrie un serviteur fidèle et dévoué, tu n’as aucun compte à nous rendre. L’amour de la patrie s’accorde d’ailleurs si bien avec la pratique de toutes les vertus !

On a accusé la Maçonnerie d’immoralité ! Notre morale, c’est la morale la plus pure, la plus sainte ; elle a pour base la première de toutes les vertus : l’humanité. Le vrai Maçon fait le bien, il étend sa sollicitude sur les malheureux, quels qu’ils soient, dans la mesure de sa propre situation. Il ne peut donc que repousser avec dégoût et mépris l’immoralité.

Tels sont les fondements sur lesquels repose la Franc-maçonnerie et qui assurent à tous les membres de cette grande famille l’union la plus intime, quelle que soit la distance qui sépare les divers pays qu’ils habitent ; c’est entre eux tous, l’amour fraternel. Et qui peut mieux attester cette vérité que la réunion même de notre convent ?

Inconnus les uns des autres, venant des pays les plus divers, à peine avions-nous échangé les premières paroles de bienvenue que déjà l’union la plus intime régnait entre nous ; les mains se serraient fraternellement, et c’est au sein de la plus touchante concorde que nos résolutions les plus importantes ont été prises d’un assentiment unanime.

Francs-Maçons de toutes les contrées, citoyens de tous les pays, voilà les préceptes, voilà les lois de la Franc-maçonnerie, voilà ses mystères. Contre elle les efforts de la calomnie demeurent impuissants, et ses injures resteront sans écho ; marchant pacifiquement de victoire en victoire, la Franc-maçonnerie étendra chaque jour son action morale et civilisatrice.