Les Constitutions Secrètes (1761)
Les Constitutions Secrètes de 1761 sont un document clé dans l’histoire du Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA) et plus largement dans l’évolution des hauts grades maçonniques. Elles constituent une charte, parfois qualifiée de “lettres patentes”, qui aurait été émise par la Grande Loge de France pour conférer à un maçon, Étienne Morin, le pouvoir d’introduire et d’organiser les hauts grades maçonniques dans les colonies françaises d’Amérique. Ces Constitutions sont entourées d’un certain mystère, et leur authenticité ainsi que leur portée exacte font encore l’objet de débats.
Contexte historique
La franc-maçonnerie du XVIIIᵉ siècle est en pleine expansion, avec une prolifération de rites et de hauts grades, en particulier en France et dans ses colonies. À cette époque, le système maçonnique traditionnel des trois premiers grades (Apprenti, Compagnon, Maître) s’enrichit de degrés supplémentaires, souvent influencés par les idéaux chevaleresques, mystiques et ésotériques.
En 1761, les Constitutions Secrètes sont émises pour répondre à la nécessité d’organiser ces hauts grades dans les colonies françaises, notamment à Saint-Domingue (actuelle Haïti) et en Amérique du Nord. Ce document joue un rôle central dans la structuration des grades écossais et dans l’émergence du système qui deviendra plus tard le Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA).
Camp des Princes du Royal Secret
CONSTITUTIONS SECRÈTES
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Si tu es sincère Maçon,
Ouvre et lis avec réflexion !
Mais ? N’observe pas pourquoi,
Et tais-toi !
Commence par la tête !
Finis par les pieds !
Mais ? Ne touche pas au corps !
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Elles contiennent les trois Rits, Ancien, Moderne et Écossais, de la Franche Maçonnerie Royale et Militaire, sur les deux Hémisphères.
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FRÉDÉRIC III, ROI DE PRUSSE,
Souverain Grand Commandeur de l’auguste Sénat.
GRANDES CONSTITUTIONS SECRÈTES
OU
RÈGLEMENTS
DES
Souverains Grands Inspecteurs Généraux,
33ème DEGRÉ,
GRANDS COMMANDEURS A VIE
DE
LA FRANCHE ET ROYALE MAÇONNERIE ANCIENNE ET MODERNE
SUR
LES DEUX HÉMISPHÈRES ;
CONSTITUÉES A
PARIS, YORK ET BERLIN
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ARTICLE I.
Symbolique
Un Souverain Grand Inspecteur Général 33ème degré a le pouvoir de faire des Maçons en loges, collèges, conseils, chapitres, souverain grand conseil, consistoire et Sénat.Il a la prérogative d’être Souverain Commandeur à vie de toute la Maçonnerie, mais il ne peut transférer ce droit qu’à un Souverain Député Grand Inspecteur Général 33ème degré comme lui, et qu’il jugerait capable de faire exécuter et remplir les pouvoirs qu’il lui laisserait en main. Il faut donc pour cela, qu’il connaisse en ce frère une volonté bien prononcée à faire ponctuellement exécuter les Constitutions Secrètes, et qu’il soit vigilant à donner connaissance de ce qui se fait au Souverain Grand Inspecteur Général 33ème le plus près de lui, ou à défaut, en droiture au premier Grand orient, soit ancien soit moderne, de Paris, Berlin ou York.
ARTICLE II.
Symbolique
Les Souverains Députés Inspecteurs Généraux ont aussi le pouvoir de nommer des Députés, en raison des facultés intellectuelles qu’ils voient dans les Chevaliers ou Princes qu’ils veulent ou qu’ils ont besoin d’instituer et de constituer. Ils leur délivrent les pouvoirs nécessaires, afin de visiter le pays où ils se trouvent, et qu’ils puissent se présenter aux loges, collèges, conseils, chapitres, souverain grand conseil et consistoire, pour y prendre connaissance de leurs travaux, voir s’ils se conforment aux Constitutions des Grands Orients qui leur ont été délivrées ; à la charge de chaque Député de faire part sur le ch a m p à son Grand Commandeur de ce qui se passe, soit en bien, soit en mal, et s’ils s’écartaient des Règlements alors le Souverain Grand Inspecteur Général se transporterait sur les lieux, s’y ferait reconnaître, e t s’il se trouvait des esprits opiniâtres et tellement entêtés de leurs fausses connaissances qu’il ne pût les amener à son but, il en écrirait à toutes les loges de la correspondance, aux trois orients susdits en motivant dans ses planches le jugement qu’il aurait rendu, soit qu’il ait d é m o l i , interdit ou cassé ce qu’ils auraient fait. Les Grands Orients d é clarent de suite le jugement du Grand Commandeur valide, en instruisant les loges de la correspondance, pour qu’elles aient à s’y conform e r, et les Constitutions s’imposent d’elles mêmes.
ARTICLE III.
Symbolique
Le Souverain Grand Inspecteur Général ou Grand Commandeur a les mêmes droits que le Grand Orient ou Sénat. Il peut suspendre, interdire, casser, annuler tout ce qui sera contraire aux Règlements. Il ne saurait trop étendre sa surveillance sur les loges bleues. C’est là principalement que se commettent les plus grands abus. Beaucoup méconnaissent les pouvoirs de quantités de frères qui possèdent les hautes dignités. Les maîtres de ces loges ne sauraient trop prendre de précautions pour éviter ces écarts, auxquels se laissent entraîner des maçons qui, quoique n’étant point élevés en grade, se croient maîtres absolus de leur conduite. Aussi est-ce en raison de cela que l’on a constitué à vie les Souverains Grands Inspecteurs Généraux que l’on a nantis des plus illimités pouvoirs, afin qu’ils corrigent les erreurs et arrêtent les progrès du vice.
ARTICLE IV.
Collège
Tout Souverain Grand Député Inspecteur Général a le pouvoir d’instituer et de constituer des loges, collèges, conseils, chapitres, souverain grand conseil, consistoire et Sénat, de faire des maçons au dehors et même en loge s’il le juge à propos ; de les élever en grades en leur faisant remettre les métaux déterminés entre les mains du trésorier ; sans que le président ni l’atelier puisse lui faire la plus légère représentation à ce sujet, sans se mettre dans son tort, et sous le coup de la plus sévère réprimande. Si le président se trouvait posséder la même dignité, alors le plus ancien dans l’endroit a la préséance ; mais par décence, et faveur spéciale, le plus ancien offre toujours sa place et ses prérogatives au visiteur qui à son tour doit en agir avec la même honnêteté et décence. Après la séance, le visiteur qui est Souverain Député Grand Inspecteur Général doit demander la soumission des travaux, qui doit lui être à l’instant présentée ; et s’il y trouve quelque chose qui ne soit pas dans l’ordre, il fait paisiblement ses observations, et fait en sorte de la faire corriger.
ARTICLE V.
Collège
Les Souverains Grands Inspecteurs Généraux Grands Commandeurs sont absolument les maîtres de l’Art Royal Militaire de l’An-cienne et Moderne Maçonnerie sur les deux Hémisphères. Ce sont eux qui la commandent et la régissent. Ils en soutiennent la dignité et en perpétuent la pureté des maximes. Ils la préservent de la dépravation, et répriment les désordres qui pourraient avoir lieu dans son sein. Quoique cet Ordre sublime se soit toujours soutenu avec splendeur et même avec applaudissement, pour mieux le maintenir et pour la conservation du Saint Empire, l’auguste Sénat a jugé à propos de constituer les Souverains Grands Inspecteurs Généraux.
ARTICLE VI.
Collège
Tout Commandeur a aussi le droit de faire des Règlements et Statuts pour les loges, collèges, conseils, chapitres, souverain grand conseil et consistoire, à seule fin de supprimer tous les abus qui pourraient exister. Ses règlements doivent être adoptés à l’unanimité et sans restriction ; et s’il éprouvait la moindre désobéissance dans leur acceptation, il en écrira de suite aux Grands Orients qui, sur sa plainte, retireront les Constitutions accordées.
ARTICLE VII.
Collège
Les Souverains Commandeurs sont chargés d’instaurer la paix et l’union entre des frères qui ne seraient pas d’accord de même qu’entre des loges d’un même endroit qui auraient quelques difficultés entre e l l e s. Ils font en sorte de les amener à parfaire union et bonne intellig e n c e, par la voix de la douceur, de la franchise et de la fraternité, et si l’une de ces loges ou toutes les deux se refusent à reconnaître l’autori-té et la médiation du Souverain Grand Inspecteur Général, le cas alors devient grav e, et la cassation ne peut être évitée. Car méconnaître un Souverain Grand Inspecteur Général, c’est méconnaître les fondateurs de l’Art Royal, ceux qui qui lui ont donné naissance, et enfin ceux qui en étaient les dépositaires et qui l’ont conservé jusqu’à ce jour.
ARTICLE VIII.
Collège
La dignité d’un Souverain Grand Inspecteur Général ou Commandeur est à vie. Elle émane des trois Orients, Ancien, Moderne et Écossais. C’est pour cela qu’un Souverain Prince Commandeur ou Souverain Grand Inspecteur Général a tous les droits et pouvoirs sur toute la Maçonnerie des deux mondes, dont il est le chef suprême, représentant lui-même personnellement les trois Grands Orients.
ARTICLE IX.
Conseil
Les présentes Constitutions Secrètes sont émanées de notre Puissant et Illustre Frédéric III, roi de Prusse, Grand Maître Souverain en Chef de l’armée des Souverains Princes et Chevaliers de l’Aigle Blanc et Noir y compris les prussiens, les anglais et les français, de même que les Chevaliers Adeptes du Soleil, du Liban, de Royal Hache, de Rose Croix, de Saint André, Chevalier d’Orient et d’Occident, de Jérusalem, Grands Élus Parfaits, Royal Arche, Marque et Passé Maître, etc., etc., etc.
Tout Souverain Grand Inspecteur Général 33ème exercera les mêmes droits que les Grands Orients. Il fait respecter les Règlements, tient la main à leur exécution, afin que le dépôt du Saint Empire soit conservé à perpétuité.
ARTICLE X.
Conseil
Toutes loges, collèges, conseils, chapitres, etc. , qui ne se conformeront pas aux présentes Constitutions Secrètes, c’est-à-dire aux trois Rites, Ancien , Moderne et Écossais, sont dans le cas de cassation et sans réplique. De plus, si l’un de ces trois Rites voulait méconnaître l’auto-rité d’un Souverain Grand Inspecteur Général Commandeur de l ’ Ordre, il lui sera présenté seulement l’article qui le condamne sans lui donner connaissance de la totalité des présentes Constitutions Secrètes qu’on ne doit exhiber qu’à un Grand Commandeur de l’Ordre ; et si on ne pouvait le convaincre de ses torts par exhibition du présent titre et articl e, on emploiera des arguments de modération : et enfin, si l’o-piniâtreté continue, il sera de suite destitué et cassé à jamais.
ARTICLE XI.
Conseil
Quand un Souverain Député Inspecteur Général Commandeur se présente à la porte d’une loge, d’un collège, d’un conseil, d’un chapitre, etc., etc., le président en doit être instruit d’avance, de suite il fait former la voûte d’acier, et il envoie sept frères armés d’une étoile chacun, de même que de leurs glaives et des drapeaux du local, observant qu’il faut que le frère porteur du drapeau possède le grade du drapeau dont il est armé. Les frères de la députation font un discours au Souverain Commandeur, et l’introduisent sous la voûte d’acier, jusqu’au trône où étant rendu, le président lui offre son maillet, qu’il accepte, s’il le veut, pour le moment, et s’il ne le veut pas, il remercie le président et prend place à sa droite.
On n’a pas le droit de tuiler un Souverain Grand Commandeur. Il fait son entrée comme un Chevalier Kadosh : et de plus, lorsqu’il est en loge ou en chapitre, etc., etc., il a le droit d’y commander, s’il voit que les travaux ne sont pas conformes aux Règlements.
ARTICLE XII.
Conseil
Le Souverain Sénat s’assemblera par quartier, s avoir le 7 juin, le 7 septembre et le 7 décembre. Tous les Souverains Grands Inspecteurs Commandeurs de l’Ordre s’y réuniront pour rendre compte chacun de sa mission, des travaux qu’il a fait et ce qu’il a reçu des Souverains Commandeurs qui sont en voyage dans des pays éloignés. A chaque assemblée de quartier, le Souverain Sénat des Souverains Grands Inspecteurs Généraux Grands Commandeurs, sur le rapport ou la plainte qui lui est présenté par un Souverain Grand Inspecteur Général Grand Commandeur, prend un nouvel arrêté sur la loge, le conseil , collège, chapitre, grand conseil, consistoire et Sénat, dont il s’agit.
ARTICLE XIII.
Conseil
Les Souverains Grands Inspecteurs Généraux Grands Commandeurs sont créés par le Souverain Sénat, qui nomme aussi neuf commissaires Grands Présidents et Grands Orateurs des augustes consistoires, possédant le sublime grade de Souverain Commandeur, pour pouvoir faire exécuter et maintenir ce que prescrivent les Grandes Constitutions Secrètes dont on ne peut donner connaissance qu’à un Souverain Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur, et jamais à aucun autre, sous quelque prétexte que ce soit.
ARTICLE XIV.
Conseil
Tout Souverain Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur a le droit de délivrer des Constitutions définitives depuis le Symbolique jusqu’au 33ème degré, sans qu’aucun Chevalier ou Prince ne puisse faire la moindre observation. Tels sont nos vœux et nos intentions, voulant et prétendant que les Grandes Constitutions soient mises à exécution dans l’intégralité de leur contenu.
ARTICLE XV.
Conseil
Les ratifications se font par le Souverain Sénat, tant pour les Patentes de Souverain Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur, que pour les Constitutions. Mais à défaut de ratification, lors-qu’un corps est constitué par le Souverain Commandeur, les Lettres de Constitution délivrées par lui sont aussi authentiques que celles du Sénat , et portent d’avance leur ratification. Tous les pouvoirs dont un Souverain Commandeur est revêtu l’autorisent à agir ainsi qu’il le fait.
ARTICLE XVI.
Chapitre
Chaque Souverain Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur aura deux registres, l’un pour ces Règlements, Constitutions et créations, l’autre pour les procès-verbaux, les plaintes, les arrêtés et autres objets de cette nature, à seule fin d’y avoir recours au besoin. Il aura toujours la précaution d’y faire signer les officiers dignitaires de la loge ou du collège, conseil, chapitre, souverain grand conseil, etc., et afin de mieux constater l’exactitude de ses travaux et la régularité de ses actes officiels.
ARTICLE XVII.
Chapitre
Un Souverain Grand Inspecteur Général Grand Commandeur doit être sobre, modéré et, jusqu’à un certain point, pacifique ; sans partialité ; grand observateur des lois, strict dans l’exercice de ses pouvoirs éminents ; sévère quand le cas l’exige. Il doit inculquer les principes de sagesse de manière à faire respecter l’Ordre Royal et à faire suivre les traces des premiers patriarches, qui furent nommés les Élèves de la Perfection ; dont les instructions et les intentions furent toujours que les Anciennes et Secrètes Constitutions de l’Ordre auguste seraient entièrement et à jamais conservées et observées.
ARTICLE XVIII.
Chapitre
Les Souverains Grand Inspecteurs Généraux Grands Commandeurs sont obligés de faire observer les fêtes des chapitres qui sont pratiquées six fois par an, et sont d’obligation. On consultera les Règlements du Souverain Chapitre de Royal Arche ainsi que ceux du Souverain Chapitre de Rose-Croix. Dans les deux chapitres on est tenu à la charité envers les pauvres, et d’une façon générale à remplir tous les devoirs qui incombent à chacun. C’est au Souverain Grand Inspecteur Général à surveiller et à faire exécuter tous les Règlements qui y sont relatifs.
ARTICLE XIX.
Souverain Grand Conseil
Le Souverain Inspecteur Général Grand Commandeur aura soin de faire munir le Souverain Grand Conseil de Lettres-Patentes de Constitution, qu’il délivrera et fera délivrer par l’auguste Sénat des Souverains Commandeurs.
Il est expressément ordonné à chaque Souverain Grand Inspecteur Général Grand Commandeur de ne point communiquer avec un Souverain Grand Conseil qui n’aurait pas de Lettres de Constitution, et de ne correspondre avec aucun qu’après avoir pris connaissance de ses Lettres-Patentes de Constitution, après quoi il pourra correspondre avec lui et même le surveiller.
ARTICLE XX.
Souverain Grand Conseil
Personne au monde ne peut engager de procédure à l’encontre d’un Souverain Inspecteur Général Grand Commandeur, ni même lui faire subir aucune pénitence. Il se l’impose lui-même ; et c’est à la Cour Souveraine des Grands Commandeurs que s’évoquent les causes qui le concernent. Lorsqu’un Souverain Commandeur, 33ème degré, est sur le point de s’asseoir en loge, collège, conseil, etc. , il fait seulement une profonde inclination de la tête au président, qui la lui rend : puis il salue de même l’atelier.
Quand il y a plusieurs Souverains Commandeurs, et qu’un autre entre, ils restent assis, et celui-ci, ayant pris place, salue les autres avant de saluer le président de la loge ou du conseil ; et ils lui rendent pareillement le salut.
ARTICLE XXI.
Souverain Grand Conseil
Les Souverains Commandeurs, 33ème degré, en quelque loge qu’ils se trouvent , sont toujours admis le chapeau sur la tête et l’épée au côté, qu’on ouvre ou qu’on ferme [les travaux] . Ils sont exempts de toutes questions ou, pour mieux dire, selon leur propre volonté ; car quand ils veulent s’en exempter, ils n’ont qu’à prendre leur épée dans la main. Comme marque de privilège et d’honneur, on leur désigne un fauteuil situé à côté du président, à sa droite.
ARTICLE XXII.
Souverain Grand Conseil
(De l’ancienneté des Grandes Constitutions Secrètes. De l’origine exacte de nos symboles ; et de quelle source émanent nos cérémonies et mystères).
Les Assidéens, secte juive, était divisés en Rahamim, ce qui veut dire « Miséricordieux », et en Tsadikim, ce qui veut dire « Justes ». Ils furent les prédécesseurs et les frères des Esséniens et des Pharisiens. Pour parvenir à l’état de sainteté et de pureté ils faisaient au-delà de ce que la loi leur prescrivait. Leurs Règlements Secrets le dénotent assez clairement . Les Athéniens, à qui ils furent transmis par la tradition orale appelaient cette doctrine Μvoτικov (Mystikon), c’est-à-dire «Philosophie Sublime ». Ces mêmes règlements n’étaient confiés qu’aux Grands Commandeurs de leur Ordre ; qui ne les transmettaient qu’à des personnes qui en étaient juges dignes, et dont ils étaient préalablement bien assurés.
ARTICLE XXIII.
Souverain Grand Conseil
Toute loge, collège, conseil, chapitre, Souverain Grand Conseil et Consistoire qui méconnaîtrait l’autorité et le pouvoir d’un Souverain Grand Commandeur, serait premièrement interdite, secondement cassée et annulée jusqu’à un jugement définitif de la Cour Souveraine, que le Souverain Grand Commandeur instruirait, étant entendu que sa sentence serait dans tous les cas confirmée. Et alors chaque frère de l’atelier incriminé ainsi que son président seront dépouillés de toutes les pièces constatant leur état maçonnique et renvoyés dans la vie profane.
Toutes les loges, collèges, conseils, etc. , en seront avisées par un tableau que le Souverain Grand Commandeur leur adressera, afin qu’ils évitent à l’avenir d’admettre en leur sein aucun de ces frères, s’il s osaient se présenter.
ARTICLE XXIV.
Souverain Grand Conseil
Tout Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur a le droit de visiter les loges, collèges, conseils, chapitres, Souverains Grands Conseils et Sénat de l’Ancienne et Moderne Franche Maçonnerie, d’inspecter, visiter leurs travaux, scruter les registres, dresser des procès-verbaux et de les faire signer par les officiers dignitaires, conformément aux présents pouvoirs.
Chez les Esséniens son nom était « Hanashia », qui veut dire « I nterprète des choses secrètes et saintes, et porteur des grands pouvoirs de l’Ordre ».
ARTICLE XXV.
Souverain Grand Conseil
Aucune loge, collège, conseil , Souverain Grand Conseil, chapitre ou consistoire, si elle n’est constituée par un Grand Orient, ou par un Souverain Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur, n’a le droit de pratiquer des réceptions et initiations à moins d’avoir demandé des Lettres de Constitution, et s’il se trouve dans l’endroit quelque Souverain Commandeur elle doit se présenter à lui et lui rendre compte de ses opérations et de ses démarch e s. Elle évite alors un voyage, d u fait que le Souverain Commandeur la constitue comme bon lui semble et la met à même de poursuivre ses trav a u x , sans avoir d’autre soumission à faire à qui que ce soit.
ARTICLE XXVI.
Grand Conseil
Toute loge, collège, conseil, souverain chapitre, Souverain Grand Conseil, tant de l’Ancienne que de la Moderne Maçonnerie, qui voudra augmenter de grade, s’adressera au Souverain Commandeur, si toutefois il s’en trouve un dans l’endroit ou dans les environs ; et à défaut, il ne pourra obtenir ce qu’il veut qu’en s’adressant au Souverain Grand Orient.
Tout Souverain Commandeur qui instituera ou constituera des loges, collèges, conseils, chapitres, Souverains Grands Conseils, peut nommer lui-même les frères qu’il jugera les plus capables aux plus hautes Dignités, telles que celles de Président, Premier et Deuxième Surveillants, Orateur et Secrétaire.
ARTICLE XXVII.
Grand Consistoire
Tout Chevalier Prince de Rose-Croix qui ferait des maçons, devra s’instruire s’il n’y a pas quelque frère Souverain Commandeur dans l’endroit ; et s’il s’en trouvait, il ira à lui et se fera connaître, et il le priera en même temps de vouloir bien régulariser les maçons qu’il aurait pu faire.
Le Souverain Commandeur ne peut se refuser à accorder au Chevalier Rose Croix la satisfaction qu’il demande ; il les régularise de s u i t e, et approuve le travail du Chevalier Rose Croix.
ARTICLE XXVIII.
Grand Consistoire
Quand un Souverain Grand Commandeur ou Grand Inspecteur Général 33ème degré constituera un Souverain Grand Conseil, il faudra qu’il fasse bien attention à remplir les principaux offices du Souverain Grand Conseil de Kadosh par des Chevaliers lettrés. Il devra considérer qu’il y a dans ce grade quatre appartements ; le trône occupé par le Grand Maître ; un Grand Député à sa droite ; le Grand Expert à sa gauche ; le Grand Garde des Sceaux à l’angle droit, conjointement avec le Grand Secrétaire ; le Grand Orateur et le Grand Trésorier à l’angle gauche ; le Grand Maître de Cérémonies à la droite du Grand Secrétaire ; et pour le reste il aura soin de se conformer aux Grandes Instructions.
ARTICLE XIX.
Grand Consistoire
Les Grands Commandeurs de l’Ordre sont aussi ceux de la Religion, et même quelque chose de plus. Leur but s’étend plus loin, et il n’est pas étonnant que beaucoup d’individus, qui n’en peuvent apprécier l’importance et l’utilité en cherchant à le découvrir, ne voient qu’à travers mille nuages fort épais. On doit avoir un soin bien scrupuleux de n’instruire de cet important secret que des personnes sûres que l’on connaît bien particulièrement, dont la discrétion est à toute épreuve, l a capacité bien reconnue, la vie et les mœurs irréprochables, et la probité au-dessus de tout soupçon ; c’est-à-dire des hommes parfaitement vertueux ; car telles sont les qualités que l’on doit rechercher.
ARTICLE XXX.
Grand Consistoire
Tout Souverain Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur doit avoir dans son registre le modèle de toutes espèces de Lettres de Constitution, depuis le Symbolique jusqu’à et compris le 33ème degré, des Rites Ancien , Moderne et Écossais ; et ce pour pouvoir en délivrer selon le besoin.
ARTICLE XXXI.
Souverain Sénat du 33ème degré
Les Souverains Grands Inspecteurs Généraux Grands Commandeurs du Saint Empire sont les dépositaires et les conservateurs des Grandes Constitutions Secrètes que sont les décrets du 33ème degré, lesquels existent depuis que le monde est monde. Ces Illustres et Admirables Commandeurs ont juré et prêté le plus terrible des serments de se conduire de manière à faire chérir l’Ordre Royal et Militaire de l’Ancienne et Moderne Maçonnerie, et de faire obéir à ses lois ; et de se conformer à, et d’exécuter, tout ce qui pourra concerner le bien-être de l’Ordre en général.
ARTICLE XXXII.
Souverain Sénat du 33ème degré
Chaque Souverain Grand Inspecteur Général Grand Commandeur doit faire exécuter à la lettre les Règlements, Statuts et Constitutions des divers grades que chacun possède. Il doit lui-même, personnellement, prêter le serment de ne donner copie des Règlements Secrets du 33ème degré à aucun maçon du monde, sans en excepter les Chevaliers Kadosh et les Princes du Royal Secret, à moins d’en avoir obtenu l’ex-presse permission du Souverain Sénat.
ARTICLE XXXIII.
Souverain Sénat du 33ème degré
Nos ancêtres Commandeurs se sont servis de paraboles pour nous instruire ; mais le sens de leurs écrits n’est pas fait pour être compris par tous ceux qui peuvent les lire. L’erreur, l’ignorance et la superstition sont le partage de ceux qui veulent essayer leurs forces contre la Raison, et contre les principes moraux de la Franche Maçonnerie.
La Maçonnerie n’a pas été jetée au hasard. Son type annonce un but moral.
Ô hommes ! Ô vous qui deviez être nos semblables ! N’encenserez-vous jamais que de vaines idoles ? Faut-il que le temple de la Vérité soit si désert ? Institution ancienne et sacrée, la Franche Maçonnerie vous offre les moyens de voir, mais les hiéroglyphes qu’elle place devant vos yeux vous sont inutiles. Le temple se dresse ouvert ; le bandeau tombe de vos yeux, et pourtant vous ne voyez pas. Qu’on vous demande : « Qu’avez-vous vu ? » Vous répondez : « Rien ».
Eh bien ! Apprenez que l’objet de nos recherches est de détruire le mensonge, et de connaître la vérité.
Tous les Souverains Grands Inspecteurs Généraux Grands Commandeurs de l’Ordre sont tenus d’avoir toujours avec eux les présentes Constitutions Secrètes, pour s’en servir au besoin.
En [Et] y avons apposé le sceau de nos Illustres Souverains Commandeurs du 33ème degré, du Souverain Sénat, et celui de notre Grand Conseil, à l’orient de Paris, sous le C. C. [Celestial Canopy], l’an de la Vraie Lumière 5761 ; en vulgaire le 27è m e août 1761 ; en hébreu lvla
[Eloul] le 27ème, 1761 . Et signé comme suit:
Maximilien de Saint Simon Chaillou de Joinville, G. P. , 3 3ème degré. Grand Commandeur, 33ème degré.
Comte de Choiseul, Topin , Grand Commandeur, 33ème degré. Grand Ambassadeur, Prince Maçon. Bouchier de Lenoncourt,
Le Souverain Prince de Rohan, Prince Maçon.
Prince Maçon. Dubantin , Brest de la Chaussée, Prince Maçon.
Souverain Prince.
Je certifie, moi, Alexandre Auguste de Grasse, Souverain Député Grand Inspecteur Général et Souverain Grand Commandeur à vie des Isles du Vent et sous le Vent. Je certifie, dis-je, que les présentes Constitutions Secrètes sont conformément à celles du Souverain Grand Commandeur Stephen Morin dont copie a été transcrite sur mon registre au Grand Orient du Cape, le 8ème jour du 5ème mois, appelé zvmt [Tamouz], près le C.C., l’an de la Vraie Lumière 5562, 8 juillet, 1802.
Signé,
Auguste de Grasse,
Grand Commandeur.
LE NEC PLUS ULTRA
Constitutions Secrètes extraites de l’ouvrage d’Albert Pike :
The Ancient and Accepted Scottish Rite of Freemasonry, publié en (1872),
Transcription du texte français réalisée par Guy Chassagnard (8 octobre 2004).
QUELQUES REMARQUES DU TRANSCRIPTEUR
La lecture et la transcription des Constitutions Secrètes de 1761 motivent les remarques élémentaires suivantes :
1 – En présentant le texte dans la préface de son ouvrage, Albert Pike parle d’un texte français et d’une traduction anglaise (in French with a translation). Dans les faits, le texte français apparaît être, plutôt, une piètre traduction de l’anglais. Citons pour exemples :
-Aux articles 7, 10 et 23, on évoque la cassation d’une loge, alors que le terme démolition était déjà en usage au XVIIIe siècle ;
-A l’article 15, on indique : Les ratifications se font par le Souverain Sénat, tant pour les Patentes de Souverain Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur que pour les Constitutions.
Le texte anglais étant : The Sovereign Senate ratifies the Patents and Constitutions granted by a Sovereign Deputy Grand Inspector General Grand Commander (en français : Le Souverain Sénat ratifie les Patentes et Constitutions délivrées par un Souverain Député Grand Inspecteur Général Grand Commandeur).
-A l’article 33 on précise : La Maçonnerie n’a pas été jettée au hazard. Son type annonce un but moral.
Le texte anglais étant : Masonry has not been founded at hazard. I t s plan announces a moral purpose (en français : La Maçonnerie n’a pas été fondée par hasard. Ses motivations révèlent un objectif moral).
2 – Que penser de la présence, à la fin du texte, parmi les signataires, de personnages dénommés Chaillou de Joinville (pour Chaillon de Jonville) ou Bouchier (pour Boucher) de Lenoncourt ?
3 – Que placer derrière les initiales figurant dans cette mention curieusement tarabiscotée : En y avons apposé le sceau de nos illustres Souverains Commandeurs du 33ème degré, du Souverain Sénat, et celui de notre Grand Conseil Orient de Paris sous le C.C. l’an de la Vraie Lumière 5761 ; sinon Celestial Canopy, dont la traduction française devrait être Voûte Céleste…
4 – Que dire encore de l’aisance qu’a éprouvée Alexandre Auguste de Grasse de déclarer les présentes Constitutions Constitutions Secrètes conformément à celles du Souverain Grand Commandeur Stephen Morin… alors que celles-ci auraient dû être pour lui conformes à et le Souverain Grand Commandeur se prénommer Étienne.
5 – Que conclure de l’observation des dates citées à la fin du document : 27 août 1761 (année maçonnique 5761), 8 juillet 1802 (année maçonnique 5562)…
6 – Nous arrêterons le flot possible de nos remarques en relevant, comme cerise sur le gâteau, l’attribution des « Constitutions Secrètes » à Frédéric III, roi de Prusse ; et en soulignant que Frédéric II, dit le Grand (1712-1786), fut roi à partir de 1740 ; ses successeurs étant :
– en 1786 :Frédéric-Guillaume II (1744-1797),
– en 1797 :Frédéric-Guillaume III (1770-1840),
– en 1840 :Frédéric-Guillaume IV (1795-1861),
– en 1861 :Guillaume Ier (1797-1888),
– en 1888,enfin : Frédéric III (1831-1888)…
Admettre que le texte français aurait pu être écrit, au XVIIIe siècle, en «français » des Antilles, ou… de Louisiane (alors inexistant), c’est, pour nous, reconnaître d’emblée son caractère apocryphe.